rogoff248_ Jemal CountessGetty Images for the Peter G. Peterson Foundation_debt Jemal Countess/Getty Images for the Peter G. Peterson Foundation

Il n'y a pas d'endettement gratuit

CAMBRIDGE – Pendant plus d'une décennie, nombre d'économistes - essentiellement, mais pas toujours de gauche - estimaient que les avantages du recours à l'endettement pour financer les dépenses publiques l'emportaient largement sur les coûts associés. L'idée même que les pays avancés puissent souffrir de surendettement était largement rejetée, et les voix critiques souvent moquées. Même le FMI, partisan habituel de la prudence budgétaire, commençait à défendre les plans de soutien financés essentiellement par l'endettement.

Mais le vent a tourné au cours des deux dernières années, ce type de pensée magique étant brutalement confronté à la dure réalité d'une inflation élevée et au retour des taux d'intérêt à long terme à leur niveau normal. Publiée récemment par trois économistes seniors du FMI, une nouvelle évaluation des risques de l'endettement souligne ce basculement remarquable. Selon l'estimation des auteurs, du fait de la médiocrité de leur perspective de croissance à long terme, le ratio moyen dette/PIB des pays avancés va augmenter de 120% d'ici 2028. Ils soulignent également que le coût élevé du crédit devenant la "nouvelle normalité", les pays développés doivent "reconstruire de manière crédible et progressive leur réserve budgétaire et veiller à la solvabilité de leur dette souveraine".

Cette évaluation équilibrée et mesurée est loin d'être alarmiste. Pourtant il n'y a pas si longtemps, toute suggestion de prudence budgétaire était rapidement rejetée en tant qu'austérité par une grande partie de la gauche. Ainsi on trouve 102 fois le mot "austérité" dans un livre d'Adam Tooze paru en 2018 portant sur la crise financière mondiale de 2008-2009 et ses conséquences.

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